COMP attention danger !
Le ministère a annoncé le mois dernier la généralisation pour 2026 des COMP (Contrat d’Objectifs, de Moyens et de Performance).
Le ministère a annoncé le mois dernier la généralisation pour 2026 des COMP (Contrat d’Objectifs, de Moyens et de Performance). Derrière cet acronyme se profile une remise en cause de l’attribution des moyens aux universités, avec un changement de philosophie qui élimine ce qui restait de la logique de service public dans l’ESR.
De manière schématique : jusqu’à présent la grande majori- té des moyens attribués par l’Etat aux universités – la SCSP, c’est-à-dire la Subvention pour Charge de Service Public – découlait d’un principe de répartition qui reposait sur une logique commune à l’ensemble des universités : une for- mation de licence en droit, par exemple, était supposée coûter à peu près la même chose d’un bout à l’autre du territoire. C’était du moins la logique du système, puisqu’il y a longtemps que les critères s’étaient obscurcis. Personne ne conteste d’ailleurs la nécessité d’une remise à plat, à Tours moins qu’ailleurs, quand on connait la sous‐ dotation dont souffre notre établissement.
Mais loin d’une reconfiguration qui aurait dû donner lieu à des concertations entre le ministère et l’ensemble des uni- versités, le gouvernement a fait le choix de casser l’idée même d’un référentiel national et de promouvoir les COMP, un dispositif expérimental qui ne concernait que des sommes marginales (moins de 1% des budgets des établis- sements). Dès 2026, on passera à 100 % de la SCSP rele‐ vant des COMP : en clair la quasi‐totalité des ressources attribuées par l’Etat, y compris pour financer les salaires, dépendront de la capacité de chaque établissement à ré- pondre aux « objectifs qu’il se serait fixé » (sic), le tout bien entendu dans le cadre d’un budget global de l’ESR qui est appelé au mieux à stagner. La concurrence entre les éta‐ blissements est donc, de fait, officialisée et ne porte plus seulement sur des dispositifs dits d’excellence mais sur l’intégralité des missions et des moyens des universités, en particulier sur la pédagogie.
« La concurrence entre les établissements est donc, de fait, officialisée et ne porte plus seu‐ lement sur des dispositifs dits d’excellence mais sur l’intégralité des missions et des moyens des universités »
Le discours sur la liberté des établissements est bien entendu resservi – les COMP constituent le fleuron du fameux acte 2 de l’autonomie – et chaque établissement est appelé à défi- nir sa « signature », en clair à se placer sur un marché des marques universitaires. À Tours, la « griffe » ce sera Loire Val Health, dont on notera que l’acronyme est proche de LVMH. Quelle chance !
Plus sérieusement, la mise en place des COMP s’inscrit dans un contexte marqué par toute une série de transformations qui visent à faire de l’insertion professionnelle immédiate des étudiant·es le seul et unique critère de la validité des forma- tions universitaires, dans une logique d’adéquation au mar- ché local de l’emploi : mise en place de la logique des compé- tences en licence, outils automatisés de mesure de l’inser- tion, sans parler du rôle qui semble avoir été donné à l’HCERES lors de la dernière vague d’évaluation, à savoir pro- poser la fermeture d’un grand nombre de formations. Mais c’est aussi bien entendu le choix de privilégier les orienta- tions de recherche jugées les plus porteuses sur le moment, ce qui dans un budget au mieux contraint, se fait nécessai‐ rement au détriment des autres.
La « note d’orientations stratégiques » de la présidence de l’UT est une illustration d’un phénomène qui touche l’en- semble des universités françaises et qui doit nous mobiliser : toutes et tous, COMPlètement contre les COMP. Nous ap‐ pelons les collègues dès maintenant à porter cette ques‐ tion dans leurs composantes dans leurs laboratoires... et à nous rejoindre en réunion syndicale pour organiser la dé‐ fense du service public.